Un livre comme une boîte à malice rempli de bons baisers…
Des baisers à découvrir, histoire d'en rire. Des baisers insolents, mordants parfois saignants. Des baisers vérité un peu comme un miroir qui nous renvoie au bout de notre histoire. Des baisers profonds, pas du tout innocents, lucides, peut-être énervants. Des baisers friandises, légèrement pimentés, pas grossissants, à déguster sans modération…des baisers l'air de rien, plein de compassion. Des baisers osés, jamais sucrés, plutôt salés, qui claquent comme un coup de fouet. Normal, faut faire circuler les idées
Manault
Manault Deva aime ses contemporains. C'est pour cela qu'elle les croque, tout crus. Elle tient une chronique hebdomadaire sur France Inter dans "3D journal" de Stéphane Paoli. Comédienne pour le théâtre, la télévision et le cinéma et auteur de chansons, elle a travaillé pour le Grand journal de Canal+, écrit des dramatiques radiophoniques et des contes pour enfants. Ses chroniques font désormais l'objet d'un livre "Bons baisers de Manault". L'occasion de retrouver le piquant d'un ton particulièrement corrosif. Elle s'attaque à la physiologie de nos contemporains : vie de couples, rapports hommes-femmes, règne de l'enfant-roi, dictature des magazines féminins, époque soi-disant libérée, dictature de la psychologie, relations mère-filles. Des bons baisers qui claquent comme un coup de fouet…normaaal, (cette expression étant sa signature) aucun travers de nos contemporains n'échappe à Manault Deva qui s'impose comme une moraliste héritière de Mme de Sévigné influencée par Cioran.
Olivier Frébourg
Préface de Christophe Mory
Avec « Les Nœuds », Manault Deva signe sa première pièce. Cette pièce n’a pas de sexe, elle est sublimement féminine : la grâce, l’élégance y prédominent. On n’y parle pas d’amour, ni de vie mais on parle de l’amour et de la vie. Des états remplacent le temps ; des changements expliquent l’éternité. Rien n’est jamais figé. Surtout : dans cette invraisemblance, tout est évident. Il n’y a pas que le nœud au ventre. Chacun de nous a ses « nœuds inextricables ». En tentant de les délier, on se rend compte de leur nombre. Ils nous emprisonnent autant qu’ils sont l’expression de ce que nous sommes. Seule une intervention extérieure permettrait de les identifier, de les dénouer, de nous apaiser. Faut-il recourir aux soins d’un psy, d’un sage, d’un philosophe, d’un clerc ? Lou pourrait se poser la question si elle n’était pas pressée par la vie ni oppressée par elle-même. Ce soir-là, elle va fêter son anniversaire-surprise chez des amis qui habitent au septième étage d’un immeuble moderne dont la façade ressemble à toutes les autres façades. Premier nœud : Lou est claustrophobe et craint les ascenseurs. Elle rencontre dans le hall de l’immeuble une femme, Blanche, qui habite dans cet immeuble et l’invite à prendre l’ascenseur avec elle. Mais l’ascenseur se bloque. Lou s’affole. L’ascenseur reprend sa course mais laissera les deux femmes sur le palier du troisième étage. Blanche se fait rassurante. Mais qui est-elle ? ? Sans âge, elle semble connaître la vie. Elle a le sens des profondeurs. Elle est belle : « Vous êtes sublime et je ne serai jamais aussi belle que vous », lance Lou épuisée, interdite, de devoir passer du temps avec cette inconnue. Et puis emportées par leurs échanges passionnés, (Lou se dit « diseuse de mots », Blanche se sait « défaiseuse de nœuds »), elles en oublieraient presque où elles se trouvent. Sauf lorsqu’elle rencontre Germain qui possède un « mangeflamme », sorte d’aspirateur qui « aspire ce qui consume les êtres ». Cet immeuble est vraiment habité par des figures étranges : fruit de l’imaginaire, des rêves, de l’inconscient ou une réalité nouvelle qu’on appréhende avec des yeux neufs, peu à peu débarrassés des nœuds ? Manault Deva surprend par une logique interne qu’elle construit, qu’elle tisse malgré les personnages eux-mêmes ; c’est là une réussite de cette pièce. D’autant que tout le monde en sort grandi : Lou, Blanche et le spectateur lui-même. Au centre : la question de bon-aise et du mal être : des nœuds que Blanche ne va pas dénouer mais que Lou finit par assumer ou dépasser. L’histoire ne s’arrête pas, autre réussite de la pièce. Car un huis-clos est toujours étouffant mais celui-là est bienfaisant. Et pendant ce temps-là, il s’en passe, des choses à l’extérieur. Atroces. Manault Deva a le don de nous les épargner. Le temps se fixe et les mots parfois se gravent dans le marbre des murs car ils deviennent définitifs : les premières phrases des grands romans reviennent en mémoire comme si elles écrivaient la grande histoire du monde. Une autre logique rejoint celle des hommes. Qui la comprendrait sinon celle ou celui qui sache respirer le parfum, le vrai parfum de la vie qui a le goût de l’éternité.